Quand la Suisse romande parlait patois. C’est le titre du dossier principal de la dernière édition de la revue Passé simple. Ce sont essentiellement des chercheurs et des chercheuses de l’UniNE qui ont contribué à ce dossier. On y apprend notamment, grâce à Dorothée Aquino, qu’avant le début du XIXe siècle, les différentes langues ne cohabitaient pas forcément harmonieusement en Suisse romande.

Le dossier principal de ce dernier numéro de la revue Passé simple met en lumière l’importance des patois dans l’histoire linguistique romande. Souvent décrite comme paisible, la cohabitation des dialectes locaux avec le français n’en reste pas moins marquée par un rapport de force dont l’issue reflète une conception du monde et des choix de société.

Les documents rédigés en patois sont rares. Et beaucoup d’entre eux témoignent de l’existence de conflits qui se cristallisent autour des langues. L’article de Sara Cotelli Kureth sur le Placard de Jacques Gruet en fait foi. L’auteur de ce texte anonyme use du genevois comme d’un instrument de contestation de la puissance publique symbolisée par la langue française.

Plus tard, la diffusion du français s’élargit et sa domination s’intensifie. Le patois subit la réprobation. Le pouvoir et l’institution scolaire considèrent comme néfaste son influence sur la langue de Molière. Cependant, comme l’évoque Christel Nissille, également chercheuse au Glossaire des patois de la Suisse romande, les autorités tolèrent certains aménagements relatifs au contexte régional.

Les tensions ne cessent qu’au moment où les langages locaux ont réellement reculé qu’ils ne constituent plus une menace. C’est ainsi, comme le relève Dorothée Aquino dans l’éditorial de la revue, que les patois font désormais partie d’un patrimoine à conserver, à défendre, et à valoriser.