Le principe d’égalité des chances est indissociable du sport de compétition. Sans lui, le sport perdrait toute valeur économique et sociale et le public s’en désintéresserait. Qu’englobe aujourd’hui ce concept ? Comment les organisations sportives le mettent-elles en place ? Et, surtout, comment font-elles face aux nouvelles inégalités liées au développement du sport ou aux impératifs économiques ? Dans son ouvrage Le droit à l’égalité des chances dans le sport, le docteur en droit et avocat Matthieu Perruchoud analyse de manière globale les règles édictées par les organisations sportives pour proposer entre autres des pistes d’amélioration.



«L’égalité des chances, c’est la possibilité donnée à chaque sportive et sportif de pouvoir remporter une compétition uniquement sur la base de son talent et de son mérite, explique d’entrée Matthieu Perruchoud. C’est un principe fondamental et constamment d’une grande actualité.»

Mais l’égalité des chances ne concerne pas que l’égalité entre les femmes et les hommes. Comme l’explique l’auteur dans son étude, il existe différents types d’égalité, principalement : l’égalité des chances formelle, qui implique l’interdiction des discriminations en lien avec le genre, la religion, l’orientation sexuelle ou l’origine sociale ; l’égalité de départ, que l’on retrouve par exemple dans les règles antidopage; et enfin l’égalité des chances de participation, avec notamment les règles de catégorisation par poids, par âge et par niveau. «Cela peut aussi concerner l’équipement des sportifs ou une particularité biologique, poursuit le docteur en droit. Le cas de l’athlète sud-africaine Caster Semenya, qui produit naturellement un taux élevé de testostérone, en est un bon exemple : doit-elle suivre un traitement pour pouvoir continuer à concourir avec des femmes ? Dans cette affaire, il a fallu mettre en balance les droits fondamentaux de cette athlète avec ceux des autres femmes à concourir dans des conditions considérées comme équitables. On le voit ici : le principe d’égalité des chances est tellement important qu’il permet aux organisations de sport d’empêcher une femme de concourir avec d’autres femmes tant qu’elle n’aura pas subi de traitement médical. La polémique n’est toujours pas terminée puisque l’athlète a récemment contesté sa "mise à l’écart" devant la Cour européenne des droits de l’Homme.»

Afin d’offrir un panorama global des réglementations édictées par les organisations sportives, Matthieu Perruchoud a répertorié tous les sports olympiques et ceux reconnus par le CIO – une soixantaine – et analysé plus de 200 000 pages de réglementations sportives et décisions du Tribunal arbitral du sport. Un travail de titan qui a abouti à des propositions d’améliorations concrètes afin de conduire à une protection plus efficace de l’égalité des chances dans le sport. Par exemple, selon l’auteur, les organisations de sport devraient prévoir des mesures plus strictes en lien avec les dépenses pour éviter qu'un-e ou des compétitrices ou compétiteurs ne possèdent d'avantages trop importants grâce à leurs moyens financiers. «Certaines organisations l'ont déjà fait, mais cela devrait être plus généralisé, poursuit-il. Les équipements devraient être au maximum standardisés afin que les compétences soient comparables. Dans ce sens, la Fédération internationale d'aviron prévoit des poids minimums pour les bateaux, afin que les compétitrices et compétiteurs "riches" ne puissent avoir un avantage trop grand sur les autres grâce à un bateau ultraléger. Cela passe aussi, dans les sports d'équipe, par une limitation du contingent des joueuses et des joueurs que peut avoir une équipe, ce qui éviterait que les équipes aux trop grands moyens financiers puissent "rafler" un trop grand nombre de joueuses et de joueurs de haut niveau.»

En résulte un ouvrage constitué en trois parties : dans la première, l’auteur définit le concept d’égalité des chances de manière globale ainsi qu’au travers de l’histoire du sport ; il expose et analyse, dans la deuxième, toutes les catégories de règles édictées par les organisations de sport ; enfin, dans la troisième, il décrit les fondements juridiques du droit à l’égalité des chances ainsi que ses implications au regard des droits suisse et européen pour finalement mentionner les différentes possibilités de mise en œuvre judiciaire ou arbitrale dans ce domaine.