Si le climat devenait plus sec et chaud, les tourbières relâcheraient plus de CO2. C’est l’un des résultats de la thèse de doctorat de Matthieu Mulot réalisée au Jardin botanique de Neuchâtel et qu’il a soutenu récemment à l’Université de Neuchâtel. Sachant que les tourbières, qui ne recouvrent qu’environ 3% des terres émergées, renferment le tiers du carbone des sols de la planète, une augmentation de température contribuerait à amplifier considérablement l’effet de serre.
«Les tourbières sont connues pour fonctionner comme des puits de carbone, explique Matthieu Mulot. Cela signifie que le sol d’une tourbière fixe plus de CO2 qu’il n’en rejette. Cette particularité est due au fait que le sol des tourbières est saturé en eau. Il devient donc rapidement privé d’oxygène. Or, la majorité des organismes du sol – et en particulier ceux qui sont les plus efficaces pour décomposer la matière organique – ne tolèrent pas ces conditions». Ainsi, la décomposition de la matière organique est fortement réduite dans les tourbières, de sorte qu’il reste davantage de carbone emprisonné dans le sol que de carbone rejeté dans l’atmosphère.
L’objectif de cette recherche réalisée sous la supervision d’Edward Mitchell, directeur du Laboratoire de biodiversité du sol, était d’étudier les communautés microbiennes des tourbières en fonction du degré d’humidité de leur environnement. Quarante-cinq mini-tourbières «en pot» ont ainsi été exposées à trois niveaux de nappe, dans le but de tester leur réaction à la sécheresse. Il en ressort que les tourbières relâchent plus de CO2 quand le niveau d’eau s’abaisse ou que la température augmente.
Le fonctionnement du sol d’une tourbière dépend notamment des micro-organismes qui le peuplent, dont les amibes à thèque qui ont suscité l’intérêt des chercheurs. «Nous avons constaté qu’en milieu humide, les communautés d’amibes sont dominées par l’espèce Hyalosphenia papilio, alors que sa population chute en milieu sec. Conclusion : la diversité en microorganismes augmente quand le climat s’assèche. Ce changement de communauté reflète bien les processus écologiques qui s’opèrent dans une tourbière lorsqu’on l’assèche.»
L’expérience réalisée durant cette thèse ne permet pas immédiatement de construire des modèles prédictifs transposables à l’échelle du globe. Elle aide toutefois à mieux comprendre les mécanismes écologiques en jeu dans la réponse des tourbières aux changements climatiques. La compréhension de ces mécanismes est cruciale pour l’élaboration de futurs modèles généraux.
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