No 133, mai 2016
Université

Moineau

Moineaux dominés : semance de meilleure qualité

Chez les moineaux, les mâles dominés compensent leur manque de succès auprès des femelles par une semence de meilleure qualité. C’est l’un des résultats du doctorat en biologie soutenu récemment à l’Université de Neuchâtel par Alfonso Rojas Mora. Son travail met en évidence les phénomènes physiologiques qui permettent d’ajuster la qualité du sperme en fonction de la place hiérarchique qu’occupe un individu. Il a été réalisé sous la supervision du professeur Fabrice Helfenstein, directeur du Laboratoire d’écophysiologie évolutive.


Le moineau Passer domesticus vit en petites colonies. L’intérêt que suscite le passereau pour la science réside dans ses capacités reproductrices qui sont intimement liées à sa position dans la hiérarchie. Mais pas dans le sens auquel on pourrait s’attendre, car ce sont les mâles subordonnés qui produisent des spermatozoïdes de meilleure qualité. La raison tient à ce que les mâles dominants s’accouplent à des femelles qui leur sont plus fidèles, ce qui n’est pas le cas de leurs congénères dominés.


En effet, les mâles subordonnés compensent leur faiblesse de succès auprès des femelles en investissant plus de ressources énergétiques dans la production de spermatozoïdes de bonne qualité, tandis que les mâles dominants peuvent se contenter de produire des spermatozoïdes d’une efficacité inférieure. Restait à comprendre comment ce processus se mettait en place.


Dans sa thèse, Alfonso Rojas Mora a montré le rôle de substances antioxydantes dans la protection des spermatozoïdes contre les attaques des radicaux libres, famille de composés connus pour leurs propriétés oxydantes. «Nous avons pu confirmer que la quantité de ressources antioxydantes présentes dans les éjaculats est positivement corrélée au nombre de spermatozoïdes mobiles observés, se réjouit Fabrice Helfenstein. Nous avons également prouvé l’effet inverse. A savoir qu’une augmentation de la production de radicaux libres entraîne une diminution de la vitesse natatoire des spermatozoïdes.»


Pour consolider ces résultats, le doctorant a procédé à une modification du statut social des moineaux qui transforme les mâles subordonnés en individus dominants et vice versa, modification qu’on peut réaliser dans des volières. «Ainsi, les mâles devenus dominants ont diminué leur investissement en antioxydants dans leurs éjaculats et ont vu la qualité de leurs spermatozoïdes diminuer, explique Fabrice Helfenstein. A contrario, les mâles devenus subordonnés ont augmenté leur investissement en antioxydants dans leurs éjaculats et ont vu la qualité de leurs spermatozoïdes augmenter.»


Les différences de qualité du sperme ne s’expliquent pas par des changements de morphologie des spermatozoïdes, soulignent les chercheurs. Cependant, les mâles dominants produisent plus des spermatozoïdes morphologiquement différents que les mâles subordonnés, ce qui suggère que les mâles dominants investissent moins de ressources dans le contrôle de la spermatogénèse, un manque de calibrage en quelque sorte.

 

Revue de presse :

- RTS La 1ère

- arcinfo.ch

- swissinfo.ch

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