Changements climatiques : La Brévine donnera toujours le frisson
Indépendamment du réchauffement climatique, la vallée de la Brévine méritera toujours son titre de Sibérie suisse. C’est l’une des conclusions d’une étude de l’équipe de climatologie appliquée de l’Université de Neuchâtel et de l’Institut fédéral de recherches WSL. Geoffrey Klein, doctorant, sa directrice de thèse la professeure Martine Rebetez, ainsi que le post-doctorant Yann Vitasse ont tenu un stand à la Fête du Froid qui a lieu à la Brévine le 6 février dernier. Ils y ont présenté leurs recherches au public.
RTS Le 19:30
Située dans une vallée fermée du Jura neuchâtelois, entre 1030 et 1300 m d’altitude, la région de la Brévine est réputée pour ses fréquents épisodes de froid sibérien. On y mesure régulièrement des températures inférieures à -20 voire -30°C, avec des extrêmes pouvant aller jusqu’à -41,8°C, un record national datant de janvier 1987.
Cette particularité est due à la topographie du lieu qui provoque un phénomène d’inversion : dans certaines situations météorologiques, la température augmente avec l’altitude, au lieu de diminuer comme c’est normalement le cas. Ce phénomène peut se rencontrer toute l’année, mais est toutefois particulièrement marqué en hiver lorsque les nuits sont plus longues que les jours. Un effet confirmé par 46 stations de mesure qui ont enregistré l’accumulation d’air froid dans le fond de la vallée jusqu’à des altitudes différentes selon les épisodes d’inversion.
«Ces inversions se produisent lorsque les conditions atmosphériques sont stables, c’est-à-dire lorsque la pression atmosphérique est élevée, le ciel clair et le vent très faible, explique Geoffrey Klein. L’air froid, qui est plus lourd que l’air chaud, s’accumule dans le fond de la vallée, sans échappatoire possible.»
Le phénomène ne dépend donc pas des températures régnant dans la région. Il reste strictement lié aux conditions topographiques locales, ce qui fait dire aux scientifiques que le réchauffement climatique global n’empêchera jamais le processus de se mettre en place. Le contraste entre le fond de la vallée et l’extérieur se maintiendra. Tout porte ainsi à croire que des températures inférieures à -20°C continueront à y être régulièrement atteintes.
28 degrés d’écart
Lors de l’hiver 2014-2015, on a pu mesurer jusqu’à 28 degrés de différence entre le fond de la vallée et les sommets environnants, notent encore les chercheurs. En fonction de la durée et de l’intensité de l’épisode d’inversion, seul le fond ou au contraire l’ensemble du vallon se remplit d’air froid. «Près de la moitié des nuits hivernales présentent ce phénomène d’inversion de température durant au moins trois heures, précise Geoffrey Klein. L’événement le plus long de l’hiver dernier a duré 66 heures.»
Le réseau d’observation de la température nécessaire à cette étude a été financé par l’Université de Neuchâtel et l’analyse des résultats par l’Office fédéral de l’environnement. L’installation des stations de mesure a pu se faire grâce à l’excellente collaboration avec les autorités communales, les propriétaires et les habitants de la vallée de La Brévine.
La chaire de climatologie appliquée a été fondée conjointement par l’Institut fédéral de recherches WSL et l’Université de Neuchâtel. Martine Rebetez et ses collaborateurs y poursuivent des recherches sur les changements climatiques et leurs conséquences en Suisse.
Revue de presse:
- Le Matin